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Commémoration 20 ans : Tous Hippocrate ?

Evénement
07 Mai 2014 Commémoration 20 ans : Tous Hippocrate ?

« Un peuple qui ne peut plus avoir confiance en ses médecins est exposé à n’importe quelle catastrophe. Je ne suis pas prophète, mais je sais que si la médecine perd sa seule noblesse, qui est de porter secours à ceux qui souffrent, à ceux qui ne sont ni beaux, ni puissants, aux mal venus, aux mal aimés, si elle les abandonne, eh bien, elle perdra son âme. Et une médecine qui n’a pas d’âme est un symptôme dramatique pour une population. »

Tous Hippocrate

Ce que dit Jérôme Lejeune

« Un peuple qui ne peut plus avoir confiance en ses médecins est exposé à n’importe quelle catastrophe. Je ne suis pas prophète, mais je sais que si la médecine perd sa seule noblesse, qui est de porter secours à ceux qui souffrent, à ceux qui ne sont ni beaux, ni puissants, aux mal venus, aux mal aimés, si elle les abandonne, eh bien, elle perdra son âme. Et une médecine qui n’a pas d’âme est un symptôme dramatique pour une population. (…) Hippocrate déjà connaissait bien ce phénomène, et son fameux serment, que prêtent tous les médecins, stipule que l’on ne donnera pas de poison à un malade, ‘même à un esclave’. Voilà un détail qui, pour cette époque où les esclaves étaient considérés comme du bétail, prend un relief extraordinaire. »

Interview de Jérôme Lejeune par Michel Leclercq, Paris-Match ,  novembre 1980

La brûlante actualité du serment d ’Hippocrate  datant du Ve siècle avant Jésus-Christ

L e serment d’Hippocrate,  prêté par Les médecins, clé de Voûte de La relation soignant – soigné, est une réflexion sur L’Homme qui éclaire Les décisions médicales et bien des choix politiques . Il a déterminé toute La Vie du professeur Jérôme Lejeune et guide aujourd’hui l’action de L a fondation Jérôme Lejeune

Le texte du serment d’Hippocrate que prêtent aujourd’hui les médecins a été adapté aux lois actuelles. Pour comprendre toute la force et l’intemporalité du serment d’Hippocrate penchons-nous sur la traduction qu’a faite Emile Littré du texte original.

« Je jure par Apollon, médecin, par Asclépios, par Hygie et par Panacée, par tous les Dieux et toutes les Déesses, les prenant à témoin, que je remplirai, suivant mes forces et ma capacité, le serment et l’engagement suivants : »

Prendre tous les dieux à témoin comme le fait Hippocrate au début de son serment c’est se référer explicitement à une loi supérieure, écrite par les dieux, que Cicéron appellera la Loi Naturelle, et dont l’existence est au cœur de bien des débats de société actuels.

Apollon, dieu de la guérison est aussi celui de l’intelligence rationnelle. Convoquer autour de lui et d’Asclépios (celui qui voulait ressusciter les morts) les autres dieux (Hygie représente la médecine préventive, Panacée la médecine curative) étend les préceptes de ce serment à toutes les formes de soin, du pharmacien au psychologue. Toutefois, si plusieurs participent aux soins, le médecin y tient un rôle spécifique et éminent qui explique qu’il soit le seul à prêter solennellement ce serment : c’est le médecin qui prend la décision thérapeutique, qui signe la prescription ou le certificat médical. Ses décisions sont parfois difficiles, lorsqu’il faut choisir le moindre mal. Sa signature l’engage devant Dieu et devant les hommes.

« Je mettrai mon maître de médecine au même rang que les auteurs de mes jours, je partagerai avec lui mon avoir et, le cas échéant, je pourvoirai à ses besoins; je tiendrai ses enfants pour des frères, et, s’ils désirent apprendre la médecine, je la leur enseignerai sans salaire ni engagement. Je ferai part de mes précepte, des leçons orales et du reste de l’enseignement à mes fils, à ceux de mon maître et aux disciples liés par engagement et un serment suivant la loi médicale, mais à nul autre. »

Un médecin ne cache pas ses découvertes pour en tirer un profit personnel, il veut au contraire que le plus grand nombre en bénéficie. La transmission de cette connaissance est destinée à ceux qui se sont engagés par serment à en faire bon usage. Le futur médecin est façonné progressivement par son maître.

Ce faisant, le maître confie une partie de lui-même à son élève, comme un père se donne à son fils. Nul ne peut mieux transmettre la loi des dieux qu’un père. Cette transmission n’a pas de prix et ne peut être achetée.

« Je dirigerai le régime des malades à leur avantage, …

Le mot régime signifie ici règle de vie : alimentation, activité physique, loisirs, environnement matériel, financier et moral. C’est-à-dire que le médecin doit veiller à la qualité de vie de son patient, s’intéressant à tout ce qui y contribue et conseillant le patient dans de nombreux domaines.

… suivant mes forces et mon jugement, …

En l’absence d’urgence le médecin peut refuser un patient, lorsque qu’il n’est pas disponible ou lorsqu’il se déclare incompétent, mais il doit l’orienter et montrer de la compassion. Evaluer ses forces et son jugement est acte d’humilité indispensable à un médecin.

… et je m’abstiendrai de tout mal et de toute injustice.

Primum non nocere a écrit Hippocrate dans « le traité des épidémies », c’est-à-dire « avant tout ne pas nuire ». Mais dans ce serment il va encore plus loin puisqu’il énonce là un précepte qui est un véritable chemin de perfection : s’abstenir de tout mal et de toute injustice.

Je ne remettrai à personne du poison, si l’on m’en demande, ni ne prendrai l’initiative d’une pareille suggestion.

Un médecin ne peut ni mutiler ni attenter à la vie d’un patient même si ce dernier le lui demande avec insistance. Le médecin doit savoir analyser la demande du patient et y apporter la bonne réponse. Les médicaments utilisés dans les soins palliatifs terminaux sont dits « à double effet » par référence à un principe énoncé par Saint Thomas d’Aquin : donnés pour soulager le patient ils peuvent hâter son décès mais sans intention de donner la mort. La démarche d’euthanasie, au contraire, repose sur l’intention de provoquer le décès du patient, c’est donc un homicide volontaire avec préméditation. Le médecin doit aimer suffisamment son patient pour lui donner l’envie de vivre.

semblablement, je ne remettrai à aucune femme un pessaire abortif.

Un pessaire était un dispositif enduit de substances censées provoquer l’avortement qu’on introduisait dans l’orifice approprié. L’avortement était bien connu dans l’antiquité et Hippocrate qui suivait des femmes enceintes s’y opposait.

Je passerai ma vie et j’exercerai mon art dans l’innocence et la pureté. »

« L’innocence », est la qualité de celui qui ne nuit pas. « La pureté » considère l’autre comme une personne, quels que soient ses troubles physiques ou psychiques, et elle empêche le soignant de se laisse troubler par le désir ou la colère. Je pratiquerai mon métier et je vivrai dans l’innocence et la pureté, afin de servir le patient avec un cœur sans partage, « de tout mon cœur, de toute mon âme et de toute ma force ». C’est un programme de vie. Plus qu’un métier, le soin est une vocation, un appel à vivre autrement. Un médecin peut être appelé à risquer sa vie pour sauver un patient.

 

Hippocrate de cos

HIPPOCRATE DE COS (460-370  avant J.C.)

contemporain de Socrate il appartenait à une famille aristocratique qui prétendait descendre d’asclépios, dieu de La médecine . Les grandes Lignes de La pensée Hippocratique sont Le souci de l’observation, La pensée rationnelle et La réflexion du médecin sur sa propre activité. pour accomplir sa mission Le médecin doit Joindre au Jugement et à L’habileté des qualités morales :  abnégation,  refus d’une Vaine gloire, conduite décente,  discrétion,  douceur . Hippocrate est Le prototype,  c’est-à- dire La meilleure représentation,  du médecin.

 « Je ne pratiquerai pas l’opération de la taille. »

L’opération de la taille était une intervention dangereuse visant à ouvrir les voies urinaires pour en retirer des calculs, faisant courir au patient un risque de décès ou de mutilation sexuelle. Elle était réservée à ceux qui en avaient les compétences. Un médecin doit limiter strictement son exercice professionnel à son domaine de compétence.

« Dans quelque maison que je rentre, j’y entrerai pour l’utilité des malades, me préservant de tout méfait volontaire et corrupteur, et surtout de la séduction des femmes et des garçons, libres ou esclaves. »

Le savoir et le pouvoir (le pouvoir de la signature pour un médecin) donnent une force de séduction dont on ne doit jamais user, quelle que soit l’orientation sexuelle du soignant et du patient et, plus largement, quels que soient leur religion, leurs choix politiques ou la couleur de leur peau. Le serment d’Hippocrate protège l’esclave dont le statut social était le pire qui soit dans l’antiquité grecque, personne ne s’en souciant tant qu’il faisait ce pourquoi il avait été acheté. Selon la convention de Genève du 25 septembre 1926 l’esclavage est « l’état ou condition d’un individu sur lequel s’exercent les attributs du droit de propriété ou certains d’entre eux ». On peut considérer que le statut d’esclave se rapporte aujourd’hui aux embryons humains dont certains voudraient qu’on puisse « user, jouir et disposer », ce qui définit les attributs du droit de propriété.

« Quoi que je voie ou entende dans la société pendant, ou même hors de l’exercice de ma  profession, je tairai ce qui n’a jamais besoin d’être divulgué, regardant la discrétion comme un devoir en pareil cas. »

Louis Portes, président du Conseil National de l’Ordre des médecins, suite à un arrêté de la Kommandantur ordonnant sous peine de mort aux médecins de signaler les blessés par balle, rappelait en 1944 que « le respect du secret professionnel étant la condition nécessaire de la confiance que les malades portent à leur médecin, il n’est aucune considération administrative qui puisse nous en dégager ». Le secret médical est absolu, « même hors de l’exercice de ma profession », c’est à dire que si au hasard d’une promenade ou d’une conversation un médecin porte un diagnostic il doit le taire.

« Si je remplis ce serment sans l’enfreindre, qu’il me soit donné de jouir heureusement de la vie et de ma profession, honoré à jamais des hommes; si je le viole et que je me parjure, puisse-je avoir un sort contraire. »

La conclusion du serment d’Hippocrate donne la clé du grand bonheur du soignant : savoir qu’il a toujours respecté les règles divines et qu’il « n’a perdu aucun de ceux qui lui avaient été confiés ».

On comprend bien en parcourant le serment d’Hippocrate que la relation soignant-soigné a une dimension pratiquement sacerdotale puisque le mouvement de don et de respect qui anime leur rencontre a des points communs avec la relation d’un prêtre (le médecin) à son dieu (le patient) : Hippocrate était issu d’une lignée de prêtres-médecins. Louis Portes, cité plus haut, écrivait que « le colloque singulier entre le médecin et le patient est la rencontre d’une confiance et d’une conscience », ce qui n’est pas sans rappeler le chant écrit par le peuple d’Israël pendant son exil à Babylone : « Que ton amour soit sur nous comme notre confiance est en toi ».

 Téléchargez le supplément des 20 ans sur Hippocrate. 

 

 


 

JL HippoTémoignage

Dr Ravel,  élève de Jérôme Lejeune (1926-1994)

On peut présenter Jérôme Lejeune comme biologiste des hôpitaux, professeur de médecine, chercheur, savant, autorité morale ou ami du pape Jean-Paul II, mais lui se définissait tout simplement comme « médecin ». Lorsqu’on était invité dans son bureau de travail on ne pouvait manquer d’apercevoir sur un mur, à portée de regard, le texte du serment d’Hippocrate en Grec. Il s’y est toujours référé pour justifier ses choix professionnels. Catholique pratiquant il aimait dire que le serment d’Hippocrate contenait toutes les valeurs évangéliques. A sa suite la Fondation Jérôme Lejeune défend les valeurs du serment d’Hippocrate.

  Le serment d’Hippocrate de Jérôme Lejeune est aujourd’hui conservé à l’Institut Jérôme Lejeune.

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