Le 4 octobre dernier, en soirée, une poignée de députés a débattu de l’un des enjeux essentiels du projet de loi bioéthique : la recherche sur l’embryon humain. Le texte du gouvernement banalise la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines (CSEh) et autorise la modification du génome de l’embryon humain, la création de chimères animal-homme, la création de gamètes artificiels ainsi que la création de modèles embryonnaires.
Alors que le texte gouvernemental franchit des lignes rouges, l’opposition a été muselée ! Un temps de parole limité a été attribué à chaque groupe parlementaire. Du fait des débats interminables sur la PMA « pour toutes », le temps de parole pour ce qui concerne l’embryon a été réduit à peau de chagrin ! Malgré ces conditions, quelques députés ont défendu avec brio l’embryon humain, se heurtant souvent au silence de la ministre de la Santé et du rapporteur Philippe Berta.
« Nous alertons sur des sujets de fond, nous demandons qu’une logique d’autorisation et non de simple déclaration s’impose sur les chimères et ni le rapporteur, ni la ministre ne daignent nous répondre… Circulez, il n’y a rien à voir ! » a regretté Patrick Hetzel (LR – Bas-Rhin).
Concernant le changement du régime juridique de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines1 (passage d’un régime d’autorisation de l’Agence de la biomédecine sous conditions à un régime déclaratif simplifié2 – article 14 du projet de loi), Patrick Hetzel a rappelé à Agnès Buzyn la conséquence de ce changement législatif profond : « À nos yeux, cela revient à méconnaître la nature propre de ces cellules souches embryonnaires et la nécessité – symbolique mais importante – de les inclure dans le champ du respect dû à l’embryon humain, qui est le premier stade de développement de la vie humaine. »
Un autre député de l’opposition, Thibault Bazin (LR – Meurthe-et-Moselle), a pointé le risque « d’alimenter une filière de création d’embryons pour obtenir de nouvelles lignées de cellules embryonnaires » ainsi que les « intérêts financiers » de la recherche sur les CSEh. Il a rappelé qu’il « existe des alternatives à la recherche sur l’embryon humain ou ses cellules souches qui sont reconnues de façon unanime, notamment dans le domaine de l’industrie pharmaceutique ».
Les députés ont fait part de leur inquiétude concernant les dispositions du projet de loi visant à permettre la différenciation des cellules souches en gamètes ainsi que la création de modèles embryonnaires à partir des cellules souches de l’embryon (article 14 alinéa 25 et article 15 alinéa 4). Cette expérimentation consiste à détruire un embryon pour obtenir ses cellules souches afin de créer à partir d’elles un modèle de l’embryon humain. Malgré l’alerte, ces dispositions ont été adoptées.
Concernant la création de chimères animal-homme (c’est-à-dire l’insertion de cellules humaines dans l’embryon animal) rendue possible par le projet de loi, Patrick Hetzel considère que « nous atteignons une limite » ; le risque est, selon Thibault Bazin, d’effacer « les frontières entre l’espèce humaine et l’espèce animale ».
Malgré cette défense, les députés présents dans l’hémicycle étaient trop peu nombreux pour faire barrage à cette banalisation de la recherche sur les csEh. L’article 17 du projet de loi autorisant la modification du génome de l’embryon humain et la création de chimères animal-homme a lui aussi été adopté. Toutefois, grâce à l’alerte donnée par les députés en commission, la représentation nationale a voté l’interdiction de modifier le génome des embryons destinés à être implantés.
Ces transgressions ne sont pas définitivement actées car le projet de loi sera débattu au Sénat début janvier.
Affaire à suivre.