La loi de bioéthique 2021 : les analyses de la fondation Jérôme Lejeune
2021 marque la troisième révision de la loi de bioéthique. Depuis le début des travaux préparatoires et tout au long des débats parlementaires on entend parler de « bioéthique à la française » tel un fanion de bonne conscience. Cette formule est entérinée et laisse penser que la loi bioéthique de 2020 s’inscrit dans un cadre de protection de la vie humaine qu’elle viendrait parfaire.
Mais qu’est-ce que la « bioéthique à la française » ? Certes, en 1994, la France a été le premier pays au monde à encadrer les techniques scientifiques et médicales en posant des principes forts de protection de la vie humaine (indisponibilité du corps humain, protection de l’être humain dès le commencement de sa vie, gratuité et anonymat du don d’organes etc.). Mais en même temps, cette 1ère loi bioéthique contournait ces principes et instituait une dérive bioéthique majeure : la procréation médicalement assistée, autrement dit la main mise sur l’embryon humain fait ou défait en laboratoire.
Jean-Marie Le Méné, président de la fondation Jérôme Lejeune, qui suit depuis leur origine les lois de bioéthique, l’affirme :
« Les lois de bioéthique ne limitent pas les dérives, elles sont les dérives ».
Au gré des révisions successives, en 2004, 2011, et aujourd’hui en 2020, les lois de bioéthique françaises régularisent les nouvelles techniques scientifiques et médicales plus qu’elles ne les régulent.
Il n’est donc pas étonnant que la loi bioéthique de 2020, confortée par 15 ans de « moins disant éthique », poursuive le tracé transgressif des lois précédentes et franchisse de nombreuses lignes rouges. Le terrain a été préparé sans que l’opinion publique n’en prenne conscience.
Aujourd’hui il faut réaliser ce que propose la « bioéthique à la française » : modification génétique de l’être humain, expérimentation des chimères animal-homme, création de gamètes artificielles ou de modèles embryonnaires, tri des embryons en fonction de leurs chromosomes, procréation artificielle à la demande, banalisation de l’interruption médicale de grossesse etc.
Informez-vous sur la loi de bioéthique, elle vous concerne.
Nos vidéos formation : que savez-vous de la loi de bioéthique ?
Qu'est-ce qu'une loi de bioéthique ?
Les premières lois de bioéthique sont promulguées en 1994. Ce que l’on appelle aujourd’hui « la » loi de bioéthique, était à l’origine trois lois. Elles avaient pour objectif de légiférer sur la question du respect du corps humain, sur l’utilisation des produits du corps humain, sur l’assistance médicale à la procréation ainsi que sur le diagnostic prénatal.
Ces lois ont été prévues pour être révisées tous les 5 ans. Cela signifie que la loi se met elle-même en situation d’insuffisance ou d’échec probable et prévoit sa propre révision.
Cela signifie aussi qu’il y a dès le début dans la loi l’idée que c’est à elle de s’adapter aux évolutions techniques et scientifiques bien plus que d’empêcher le développement de pratiques transgressives.
Depuis la première loi, deux révisions ont eu lieu : l’une en 2004, l’autre en 2011.
Les principaux éléments de changement furent l’interdiction de créer des embryons par clonage et l’introduction de dérogations dans l’interdiction de la recherche sur l’embryon.
La troisième révision de la loi a lieu actuellement
Les chimères : embryons animal-homme

Une chimère est un « organisme constitué de deux ou plus rarement de plusieurs variétés de cellules ayant des origines génétiques différentes » (Larousse médical, édition 2012). Il peut être question d’embryons chimères homme-animal, c’est à dire d’embryons humains dans lesquels sont injectées des cellules souches animales, ou l’inverse, d’embryons chimères animal-homme, c’est-à-dire d’embryons animaux dans lesquels sont insérées des cellules souches humaines.
Cette expérimentation vise à vérifier la pluripotence de ces cellules souches, afin de constituer un test de référence. De manière plus lointaine, les chercheurs envisagent de créer des animaux qui seraient dotés d’un organe humain. Il s’agirait de pallier le manque de dons d’organes en permettant des xénogreffes. Cela serait rendu possible « par l’inactivation, dans un embryon animal, de certains gènes responsables du développement d’un organe ciblé, auxquels viendraient se substituer des cellules humaines pluripotentes (cellules souches embryonnaires ou iPS) ».
Au regard des risques sanitaires, des risques de conscience et de représentation humaines chez l’animal, la prochaine loi de bioéthique doit donc interdire expressément les chimères animal-homme, au même titre que les chimères homme-animal.
L’article 17 du projet de loi, dans sa version initiale, prévoyait la création de chimères animal-homme à partir de cellules souches embryonnaires humaines (CSEh) ou de cellules souches pluripotentes induites (cellules iPS). Le Sénat, lors de l’examen du texte en 1ère lecture, s’est opposé à cette disposition et a supprimé l’article 17. Lors de l’examen du projet en 2ème lecture, l’Assemblée nationale s’est prononcée en faveur de la création de chimères. Elle a réintégré l’article 17 dans le projet de loi.
Les embryons humains génétiquement modifiés

Le code de la santé publique interdit la création d’embryons transgéniques, c’est-à-dire la suppression d’un gène, l’ajout d’un gène extérieur ou la modification d’un gène existant en utilisant notamment le ciseau moléculaire CRISPR-Cas 9.
Toute modification génétique au stade embryonnaire précoce entraine la transformation de toutes les cellules de l’embryon y compris les cellules qui donneront la lignée germinale. Ainsi, en cas de transfert à des fins de gestation d’un embryon génétiquement modifié, la transmission de la modification génétique à la descendance sera inéluctable.
L’édition du génome d’embryons humains implique d’une part la création d’embryons humains par fécondation in vitro. Elle implique d’autre part des recherches sur ces embryons humains qui entraînent leur destruction.
En créant des embryons humains par déconstruction et reconstruction du génome, les chercheurs créent des embryons aux seules fins de leurs recherches. Ils transforment les embryons humains en objet, ces derniers sont ainsi créés pour servir la recherche. Cette transgression, interdite par l’article L 2151-2 du code de la santé publique, est majeure. En chosifiant l’embryon elle nie son humanité et anéantit le respect qui lui est dû.
Le diagnostic pré-implantatoire des aneuploïdies (DPI-A)

Le DPI-A c’est le diagnostic pré-implantatoire des aneuploïdies. Ce test diagnostic est pratiqué dans le cadre de la procréation médicalement assistée (PMA). Il vise à détecter et détruire dans l’éprouvette les embryons aneuploïdes c’est-à-dire les embryons qui comportent un nombre anormal de chromosomes (par exemple : les embryons porteurs d’une trisomie 21).
Que prévoit la loi en vigueur ?
Le DPI-A n’est pas autorisé en France. En revanche, depuis les 1ères lois de bioéthique de 1994, peuvent recourir au DPI les couples (ou leurs ascendants directs) qui sont porteurs d’une « maladie génétique d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic ». Aujourd’hui, le DPI est limité aux pathologies graves et héréditaires.
Dans le cadre de la révision de la loi de bioéthique en cours, certains parlementaires ont demandé, par voie d’amendement, l’extension du DPI à des anomalies du génome qui ne sont pas, en principe, héréditaires : les aneuploïdies ou anomalies du nombre de chromosomes.
Les parlementaires ont écarté le DPI-A de la loi de bioéthique
L'interruption médicale de grossesse (IMG)

L'Interruption médicale de grossesse (IMG), dit également avortement thérapeutique, peut être réalisée :
- si la grossesse met gravement en danger la santé de la femme enceinte,
- ou si l'enfant à naître est atteint "d'une affection particulièrement grave et incurable" (ce qui comprend, dans l'esprit de la loi, la trisomie 21 par exemple).
Le projet de loi vient banaliser l’IMG (articles 20, 21 et 22), et la pose comme une « solution » pour les grossesses multiples, dont l’augmentation est en partie due à la hausse des pratiques de PMA. Ces dernières années, plusieurs lois ont conduit à une forme d’encouragement de l’interruption volontaire de grossesse. C’est maintenant au tour de l’interruption médicale de grossesse, qui peut se pratiquer jusqu’à la veille de la naissance pour raisons dites « médicales ».
L’insertion d’une clause de conscience spécifique pour l’IMG laisse penser que la suppression de la clause spécifique de l’interruption volontaire de grossesse se prépare. Cette suppression fait l’objet de revendications depuis plusieurs mois.