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L’espérance de l’aurore

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22 Nov 2015 L’espérance de l’aurore

Éditorial de Jean-Marie Le Méné, Président de la Fondation Jérôme Lejeune, pour la lettre de la Fondation de décembre.

« Les gens réclament de l’espérance comme les mourants réclament de l’eau. On ne compte plus les nécessiteux de l’espérance. Ni ces demandes de raisons d’espérer et de signes d’espérance qui sont autant de bouteilles de détresse lancées à la mer.  

Qu’est-ce qui peut encore nous faire tenir debout ? »

JMlemene

Éditorial de Jean-Marie Le Méné, Président de la Fondation Jérôme Lejeune, pour la lettre de la Fondation de décembre (bouclée le 10 novembre 2015). – Twitter : @jmlemene


 

« Les gens réclament de l’espérance comme les mourants réclament de l’eau. On ne compte plus les nécessiteux de l’espérance. Ni ces demandes de raisons d’espérer et de signes d’espérance qui sont autant de bouteilles de détresse lancées à la mer. Qu’est-ce qui peut encore nous faire tenir debout ? Les gens veulent vivre, mais on a tué leur espérance, alors ils meurent. Mus pas un ultime instinct de conservation, ils quémandent une dernière bouffée d’espérance. Que va-t-on leur donner ?

La pire des choses est de mentir en montrant des ersatz d’espérance partout. Ces spécialistes du mirage à bon marché sont dangereux, ils précipitent la mort dont ils ne veulent pas voir les causes. N’oublions pas Péguy : « La foi va de soi, la charité va de soi, mais l’espérance ne va pas de soi. C’est d’espérer qui est difficile ». N’oublions pas Bernanos : « On ne va jusqu’à l’espérance qu’à travers la vérité, au prix de grands efforts. Pour rencontrer l’espérance, il faut être allé au-delà du désespoir. Quand on va jusqu’au bout de la nuit, on rencontre une autre aurore ». Mais il n’est pas possible de sacrifier la vérité de la nuit à l’espérance de l’aurore.

La nuit que nous devons affronter, c’est celle de l’Homme. La présence de l’Homme dans le monde était un socle, un axe, un pivot. Aujourd’hui l’Homme est évacué à la périphérie du monde. Il fait partie du vaste foisonnement du vivant. La valeur de l’Homme n’est plus singulière : il vaut plus cher en pièces détachées que sur pied. Chez lui, tout s’achète et tout se vend. L’Homme est en miettes, mais il reste les miettes et chacune vaut son pesant d’or. Le marché autoritaire a remplacé l’État autoritaire. Le transhumanisme fondé sur la technologie, le profit et l’évolutionnisme nous annonce un basculement inévitable de l’Homme vers une autre espèce. Une espèce augmentée enfin débarrassée des imparfaits en début et en fin de vie. Nous y sommes en plein. Notre société y a adhéré. Elle produit des lois en ce sens tous les jours.

La Fondation Jérôme Lejeune est au cœur de cette bataille d’apocalypse. L’apocalypse, un dévoilement de la vérité dans la catastrophe qui n’est pas triste mais exaltant. La vérité c’est que l’espérance ne rime qu’avec naissance et enfance. Rien de puéril ou d’infantile dans ce rapprochement. Le seul vrai renouvellement, c’est l’unicité de cette personne qui naît d’une altérité amoureuse pour agrandir la fraternité humaine. Nous savons que si nous lâchons sur cette « incroyable signification de la vie humaine », nous renonçons à tout et il n’y a plus de raison d’espérer. Au nom de quoi éviter à une femme d’avorter, empêcher un médecin d’endormir définitivement un vieillard ou d’achever un handicapé, renoncer à une procréation sur catalogue ? Chaque jour, la Fondation traverse la nuit du mépris des plus petits pour les mener à l’aurore.

C’est notre espérance et ce doit être aussi la vôtre. Car, ne vous faites aucune illusion, nous ne valons pas plus – ni moins – que ces petits. Notre vie, comme la leur, est tout autant menacée. Nous entrons dans l’interdépendance de la vulnérabilité sous arbitrage du marché. Ce temps où rien – et surtout pas l’espérance – ne va de soi est une aubaine en ce qu’il oblige à repartir du réel : le miracle de la naissance (Hannah Arendt) et le combat « pour les visibles prodiges comme s’ils étaient invisibles » (Chesterton). »

 

Jean-Marie Le Méné,

Président de la Fondation Jérôme Lejeune

 

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