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L’édito de Jean-Marie Le Méné

Éditorial
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19 Mai 2022 L’édito de Jean-Marie Le Méné

Dès le lendemain du premier tour de la présidentielle, le vainqueur a annoncé que l’euthanasie serait la grande loi sociétale du quinquennat. Une réforme qui ne sera pas difficile à conduire tant les esprits ont été préparés à cette évolution. Le succès de la loi annoncée repose sur une mécanique inéluctable : le continuum entre l’arrêt des soins et l’euthanasie.


Pour bien comprendre, revenons en arrière. La loi Leonetti de 2005 a autorisé l’arrêt des traitements qui ont pour seul effet le maintien « artificiel » de la vie du patient. Largement sujette à interprétation, cette disposition a permis au Conseil d’Etat de juger légale la décision de provoquer la mort par arrêt de l’hydratation et de l’alimentation « artificielles » d’un homme – Vincent Lambert – incapable d’exprimer ses volontés et qui n’était pas en fin de vie. Au regard des souffrances provoquées, la loi Claeys-Leonetti de 2016 a associé systématiquement le protocole à une sédation profonde et continue jusqu’au décès. Une pratique qui vise à accélérer voire à provoquer la mort du patient. Aujourd’hui, les partisans de l’euthanasie ont beau jeu de dénoncer l’hypocrisie d’un système qui conduit à faire mourir une personne consentante dans un délai qui peut aller jusqu’à trois semaines alors que quelques heures suffisent.

Prétendre éviter l’euthanasie par le développement des soins palliatifs, en même temps qu’une meilleure application de la loi Léonetti-Claeys, est illusoire

Ce type de législation d’arrêt des soins s’est répandu en Europe, notamment en Italie où la Cour constitutionnelle a exclu la pénalisation du suicide assisté qui s’exécute dans le respect des conditions légales s’appliquant aux personnes qui pouvaient déjà choisir de mourir en renonçant à tout traitement. La Cour a ainsi établi une continuité entre l’action du médecin pour anticiper la fin de vie et son action pour précipiter la mort. Ne s’agirait-il pas de deux actes médicaux au profit des mêmes patients « autodéterminés » et dont les effets sont identiques ? On le voit, le glissement d’un arrêt des soins avec sédation – type loi Léonetti-Claeys – vers l’euthanasie dite « active » est en marche parce que le continuum est inéluctable.

Prétendre éviter l’euthanasie par le développement des soins palliatifs, en même temps qu’une meilleure application de la loi Léonetti-Claeys, est donc illusoire. Si le développement des soins palliatifs est nécessaire c’est à condition d’exclure clairement de sa pratique tout arrêt des soins. Car anticiper la fin de vie par l’arrêt des soins ou précipiter la mort par l’euthanasie ne sont pas des actes médicaux. Les politiques n’ont pas à imposer à la médecine de mettre en œuvre des lois sociétales qui dénaturent sa vocation.

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