Edito de Jean-Marie Le Méné
Le 8 décembre 2020, le comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’est prononcé favorablement à l’allongement du délai de l’avortement de 12 à 14 semaines. Pas de problème éthique pour le comité d’éthique étatique. Cette opinion ne décevra que ceux qui pensent encore que le CCNE est chargé d’exprimer un point de vue moral sur des questions de société. Il n’y a pas lieu d’en être surpris, ni même affligé. Le comité d’éthique, créé pour soumettre la morale naturelle aux exigences de la modernité, est fidèle à sa mission. Le CCNE a généralement fait la promotion des transgressions auxquelles il accoutume l’opinion publique. En l’espèce, les gynécologues-obstétriciens sont majoritairement opposés à cette mesure. Qu’à cela ne tienne, le comité d’éthique prend le prétexte des quelques femmes qui avorteraient hors délai à l’étranger pour en ouvrir la possibilité légale à toutes les autres, au nom de l’égalité d’accès. Le CCNE est un outil politique, pas une autorité morale.
Il est délicat d’aborder cette question pour deux raisons. D’abord parce que dissuader de l’avortement peut conduire en prison. Ensuite parce les gens ont l’impression que l’on s’immisce dans leur vie privée. Pourtant, il faut réaliser que la légalisation de l’avortement est moins une question de morale personnelle qu’une arme politique. Un Etat qui accepte qu’une mère supprime son enfant avec la complicité de la médecine, parce qu’il a peur de passer pour l’adversaire des femmes en soutenant la maternité, est capable de lâcher sur tout. L’avortement produit un effet cliquet. Pas de nouvelle avancée sociétale qui, pour circonvenir les hésitants, ne brandit l’avortement comme un talisman. Une fois l’avortement légalisé, il paraît beaucoup moins grave de faire accepter la PMA pour toutes, le remplacement des animaux de laboratoire par des embryons humains, l’eugénisme et les chimères, bref toutes les folies transhumanistes de la marchandisation du vivant.
Si l’on voulait diminuer le recours à l’avortement, il faudrait cesser d’invoquer le retour à « l’esprit de la loi Veil ».
Si l’on voulait diminuer le recours à l’avortement, il faudrait cesser d’invoquer le retour à « l’esprit de la loi Veil ». La loi Veil n’est pas la solution mais le problème. Elle contient le scénario de tout ce qu’elle engendre, y compris celui de sa propre disparition dès lors que l’avortement sera devenu un soin comme un autre, ce qui est quasiment acquis. Sa malice ne réside pas dans l’excès d’une pratique qui se libéralise. L’enfant ne meurt pas moins à 12 qu’à 14 semaines et l’homicide n’est jamais le geste d’un médecin. De même, il serait nécessaire de réaliser que l’avortement ne concerne pas que les femmes. La chaîne des mensonges indispensables qui le permet (depuis la négation de l’humanité de l’embryon et l’éviction du père jusqu’au déni des conséquences) est telle qu’elle impacte la société dans son ensemble. Avec l’avortement, l’Etat de droit est inversé, ce n’est plus tuer mais refuser de le faire qui est criminel. Si cela était dit, se fixer une diminution du taux de recours à cet acte deviendrait une évidence.
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