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Euthanasie : quel risque pour les personnes porteuses de déficience intellectuelle ?

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Bioéthique
09 Jan 2025 Euthanasie : quel risque pour les personnes porteuses de déficience intellectuelle ?

La perspective d’une légalisation de l’euthanasie inquiète – non sans raison ! – les familles des personnes porteuses de déficience intellectuelle. Lucile Strauch-Hausser qui avait initié une mobilisation au printemps dernier, lance désormais un collectif pour demander à ce que ces personnes soient explicitement exclues du projet de loi. Elle répond en exclusivité à nos questions.

Pourquoi ce collectif ?

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Mon mari et moi sommes les heureux parents de Victoire, une petite fille porteuse de trisomie 21. Comme tous les parents, et encore davantage ceux d’enfants handicapés, une de nos préoccupations est son avenir après notre disparition. L’arrivée de la loi sur l’euthanasie dans le débat politique a fait naître une forte inquiétude supplémentaire. Victoire sera-t-elle poussée, plus ou moins insidieusement, à « demander » l’euthanasie à cause de son handicap ? 

Nous avons alors assisté à une soirée documentaire Tout mais pas ça au cours de laquelle j’ai eu la conviction que je devais interpeller les élus. J’ai écrit à plusieurs d’entre eux. M. Bayrou, maire de Pau et désormais Premier ministre, m’a répondu qu’il partageait mes craintes. Après la première lecture du projet de loi, il m’a semblé lors d’une interview qu’il faisait allusion à ma lettre. J’ai ainsi compris que nous, familles et amis de personnes porteuses d’une déficience intellectuelle, pouvions être entendus. C’est même un devoir de prendre la parole ! Nous avons donc initié une mobilisation afin de protéger nos proches de la menace que représente pour eux ce projet de loi.

Quels ont été les premiers pas de cette mobilisation?

La mobilisation a eu lieu dans l’urgence car le texte était en cours de débat à l’Assemblée nationale. Nous avons rédigé une tribune collective qui a rassemblé une centaine de signatures et l’avons fait publier sur le site du FigaroVox. Nous l’avons aussi envoyée à plusieurs députés. Certains l’ont citée explicitement en séance publique. Puis la dissolution de l’Assemblée a tout arrêté. La perspective de la reprise des débats en 2025 nous remobilise. Cet été, nous avons appris qu’un médecin à Angoulême avait arrêté les soins d’une personne porteuse de trisomie 21, contre l’avis de sa famille, sans justification médicale. Cela a encore renforcé notre inquiétude. Qu’arrivera-t-il si l’euthanasie est possible pour nos proches ? Pourront-ils seulement y échapper ? Cela nous a convaincus de l’urgence d’agir. Nous voulons faire connaître notre collectif, qui se nomme désormais UN GROS RISQUE EN PLUS. 

Qu'envisagez-vous dans les semaines à venir ? De quoi avez-vous besoin ?

En 2025, le débat va reprendre. Notre intention est intacte : rassembler un maximum de citoyens pour obtenir le maintien de l’interdit de tuer les personnes ayant une déficience intellectuelle. Chacun doit agir en signant le manifeste sur ungrosrisqueenplus.org.

Parents, proches d’une personne avec une déficience intellectuelle, interpellez votre député et relayez notre demande par courrier, mail, téléphone ! Nous allons aussi sensibiliser un maximum d’associations. Nous comptons bien nous faire entendre !

Nous demandons l’interdiction explicite de l’euthanasie et du suicide assisté pour les personnes porteuses de handicap mental

Extrait de la tribune collective signée par 75 parents, et publiée sur le Figaro Vox le 4 juin 2024

Alors que les députés débattent dans l’hémicycle du droit au suicide assisté ou à l’euthanasie, nous, parents et proches de personnes porteuses de déficience intellectuelle, suivons vos échanges avec stupéfaction et angoisse. Nous en appelons à un sursaut d’humanité et de raison et demandons collectivement l’interdiction explicite de l’euthanasie et du suicide assisté pour les personnes touchées par une déficience intellectuelle, au premier rang desquelles, celles porteuses de trisomie 21. Que nul ne vienne prétendre que ces personnes ne risquent pas d’en être victimes. […] L’euthanasie pour seul motif de déficience intellectuelle n’est-elle pas déjà pratiquée aux Pays-Bas ? Le projet de loi débattu actuellement est bien une menace réelle pour eux. Ces personnes ont besoin d’être aidées dans toutes les tâches de la vie courante, d’être accompagnées de près médicalement et humainement, d’être soutenues financièrement. Demain, il sera insinué qu’ils sont un poids pour leur entourage et pour la société et que ce serait plus simple pour tout le monde et plus « digne » pour eux, de mettre fin à leurs jours plus tôt que prévu. Quid enfin du message envoyé au personnel médical ? Ce projet d’« aide active à mourir » incitera tout le monde à céder au désespoir, à la pression sociale ou aux restrictions budgétaires, et à baisser les bras en mettant volontairement fin à une vie jugée trop encombrante. […] Nos proches ont bien un « p’tit truc en plus ». Ils doivent être protégés.

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